Dans le but de favoriser la croissance économique résultant de l’augmentation en popularité des systèmes d’aéronefs télépilotés (SATP), Transports Canada a publié, en avril 2020, ses intentions concernant la réglementation des opérations de SATP en portée visuelle (VLOS) et hors de la portée visuelle (BVLOS). L’objectif de cette nouvelle réglementation est de pouvoir autoriser les vols BVLOS présentant un faible risque sans avoir à satisfaire aux exigences actuelles d’un certificat d’opérations aériennes spécialisées (COAS). Cette nouvelle réglementation permettra aussi les vols autant VLOS que BVLOS d’appareils plus lourds, allant jusqu’à 650 kg, dans certaines conditions sans avoir à demander de COAS.
Présentement, seuls les vols VLOS de SATP pesant de 250 g à 25 kg sont couverts par le cadre réglementaire. Les opérations de drones de 250 g et plus ne répondant pas aux exigences actuelles du RAC doivent toutes être autorisées au cas par cas par Transports Canada au moyen d’un COAS. Cela représente un fardeau administratif supplémentaire aux opérateurs ainsi que des délais occasionnés par la révision de la demande de COAS par un inspecteur de Transports Canada. De plus, certaines opérations comme les vols BVLOS au-dessus des zones habitées ne sont tout simplement pas envisageables dans la majorité des cas.
Dans cette proposition réglementaire, Transports Canada vise à donner une plus grande flexibilité aux opérations se déroulant en visibilité directe tout en autorisant certains types d’opérations BVLOS. Afin d’y parvenir, le Ministère prévoit adopter une approche basée sur la gestion des risques. Seules les opérations présentant niveau de risque assez faible seront couvertes par cette nouvelle réglementation. Les vols à haut risque devront faire l’objet d’une demande de COAS jusqu’à une révision ultérieure du Règlement de l’aviation canadien (RAC).
Note : Le futur simple est favorisé en lieu du conditionnel afin de faciliter la rédaction et la lecture.
Afin de maintenir le risque à un niveau acceptable, le Ministère se basera sur les 3P : le pilote, le produit et les procédures.
Le pilote
Transports Canada prévoit augmenter le niveau de connaissance nécessaire pour autoriser les pilotes de SATP à voler en BVLOS, notamment au niveau des espaces aériens, de la météo, des facteurs humains, des communications radio, de la navigation, des systèmes et de la maintenance. Le Ministère prévoit aussi que, pour opérer dans ces conditions, un certificat de pilote pour opérations avancées sera nécessaire en plus d’un programme de formation au sol et d’un examen en vol portant sur les exigences supplémentaires des vols en BVLOS. De plus, l’âge minimal sera porté à 18 ans pour les opérations hors de la portée visuelle et un certificat médical du pilote pourra être nécessaire dans certains cas.
Le produit
Présentement, les SATP de 250 g à 25 kg opérant en VLOS dans les conditions d’opérations avancées doivent avoir fait l’objet d’une déclaration de sécurité de leur manufacturier. Cette déclaration spécifie que le système répond à la norme 922 du RAC quant à la conception et aux capacités de l’aéronef. Puisque les opérations BVLOS et les SATP de plus de 25 kg présentent un niveau de risque plus élevé, la norme sera modifiée afin d’inclure une catégorie « Déclaration Plus ». Cette nouvelle catégorie nécessitera que les systèmes soient conformes à des normes plus élevées en plus d’exiger des manufacturiers qu’ils fassent une déclaration annuelle quant à la conformité de leurs systèmes.
De plus, les exigences de maintenance pour les nouveaux types d’opérations seront aussi relevées. Un système de contrôle de la maintenance devra être mis en place par les opérateurs. Ceux-ci devront désigner une personne responsable de la gestion des procédures de maintenance et de tenir à jour un manuel de contrôle de la maintenance (MCM). Ce manuel devra contenir les politiques de l’organisation, les procédures de maintenance et le programme de formation pour le personnel effectuant les tâches de maintenance.
Transports Canada évalue aussi la possibilité d’exiger que les SATP soient munis d’un système de détection et d’identification. Il serait envisageable que, dans certaines opérations, les drones doivent minimalement diffuser leur numéro d’immatriculation à des fins de gestion du trafic.
Les procédures
Pour les opérations en portée visuelle, Transports Canada prévoit garder les expressions «environnement de base», «à proximité des personnes» et «au-dessus des personnes» pour différencier les opérations. La différence avec la réglementation actuelle se trouvera au niveau du poids de l’aéronef et des distances minimales par rapport aux personnes qui ne participent pas à l’opération. Cette distance augmentera avec la catégorie de poids du SATP. Ainsi, au lieu des 100 pieds minimum à respecter par rapport aux personnes pour rester dans l’environnement de base avec un drone de 250 g à 25 kg, un aéronef de plus de 25 kg à 150 kg devra se tenir à une distance minimale de 300 pieds et un appareil de plus de 150 kg à 650 kg devra maintenir une distance minimale de 500 pieds. Le requis pour opérations de base en termes d’espaces aériens contrôlés et les distances des aéroports et héliports resteront les mêmes que ceux présentement en vigueur.
Pour les opérations avancées, les distances seront aussi revues à la hausse pour les catégories «à proximité de personnes» et «au-dessus de personnes» telles que décrites dans le tableau suivant.
Pour les opérations hors de la portée visuelle, il sera difficile pour les pilotes de déterminer si leur appareil s’approche d’une personne qui ne fait pas partie de l’opération. Les vols BVLOS seront alors divisés en quatre catégories : opérations isolées, opérations dans un rayon de 1 km d’une zone avec plus de 25 habitants par kilomètre carré, opérations au-dessus d’une zone avec une densité de population de plus de 25 personnes par kilomètre carré et opérations dans un espace aérien contrôlé. Pour les trois premières catégories, l’altitude maximale sera limitée à 400 pieds au-dessus du sol.
Les régions isolées sont les régions à au moins 1 km d’une zone où la densité de population est de plus de 25 habitants par kilomètre carré. Afin de déterminer ces régions, il est suggéré d’utiliser les dernières données de recensement disponibles sur le site de Statistique Canada. L’opérateur devra aussi s’assurer qu’aucune nouvelle construction ou évènement ne pourrait faire grimper la densité de population au moment du vol. Cela ne prendra pas en compte les randonneurs et les campeurs pour lesquels il est impossible de garantir les mouvements.
Les opérateurs désirant faire des opérations BVLOS à faible risque devront aussi respecter d’autres restrictions mises en place par Transports Canada. Par exemple, les minimums météorologiques pour les aéronefs habités en vol à vue s’appliqueront aussi aux SATP. Une quantité d’énergie ou de carburant minimale sera aussi exigée ainsi qu’une planification de vol détaillant le déroulement normal du vol et les procédures alternatives en cas d’urgence.
En outre, dépendamment du poids du SATP, la taille de l’organisation et du niveau de risque de l’opération, le Ministère pourra aussi exiger des opérateurs que ceux-ci obtiennent un certificat d’exploitation de SATP (CES). Ce certificat sera similaire à celui des compagnies aériennes et sera délivré suite à un contrôle des compétences organisationnelles (CCO) effectué par une personne tierce détenant une qualification d’examinateur de vol et une formation sur les CCO. L’opérateur recevra son CES s’il démontre la capacité de son organisation à effectuer ses opérations en toute sécurité. Cela passera par l’implantation de procédures normalisées d’exploitations, une structure organisationnelle comprenant du personnel adéquatement formé et un programme de maintenance.
Les différentes catégories d’opérations BVLOS sont résumées dans le tableau suivant.
Conclusion
Avec cette proposition de modification réglementaire, Transports Canada espère pouvoir faciliter l’intégration des opérations BVLOS dans l’espace aérien canadien et faciliter les opérations en VLOS. Cette nouvelle réglementation pourrait aussi avoir pour effet de stimuler l’économie en ouvrant un tout nouveau secteur de l’aviation.
Transports Canada prévoit publier la première ébauche de cette réglementation dans la partie I de la gazette du Canada au printemps 2021. Vous pouvez consulter l’avis de proposition de modification complet ici.